DÉCLARATION PRÉLIMINAIRE
Mesdames et messieurs les journalistes
L’avant projet de constitution de la 3ème république vient d’être présenté le mercredi 5 octobre 2016 par le président de la république Alassane Ouattara à l’Assemblée Nationale. La commission des affaires générales et institutionnelles du parlement vient de l’adopter sans amendement selon la presse. Ce mardi 11 octobre, les députés sont conviés en plénière à parachever cette adoption. La prochaine étape sera le référendum qui est prévu pour le 30 octobre 2016.
Nous sommes à moins de 20 jours du référendum constitutionnel et nous constatons que le pouvoir Ouattara n’a pas encore mis à la disposition des ivoiriens le projet de loi à soumettre au vote. Pendant que l’opposition n’a pas droit à la parole dans les médiats d’Etat, qu’elle est interdite de manifestation publique, le pouvoir Ouattara manœuvre pour un forcing, un holdup électoral. En retardant au maximum la parution du projet à soumettre au référendum, il veut arracher frauduleusement le oui. Il ne veut pas que les peuples aient le temps nécessaire pour détecter dans cette loi proposée, les atteintes aux libertés et à la démocratie, la codification d’un pouvoir d’essence autocratique.
Mesdames et messieurs les journalistes
A l’analyse du contenu de cette constitution qui se voulait une rupture avec la constitution de 2000, une constitution dont les avancées au plan des libertés, de la démocratie, de la séparation des pouvoirs, du contrôle des élus, de l’autonomie administrative et de la sauvegarde de la souveraineté, devraient projeter la Côte d’Ivoire dans une république démocratique et moderne, l’on dénote que le pouvoir Ouattara sert aux peuples une constitution d’essence autocratique, encore enfoncée dans l’ivoirité, une constitution qui organise la succession au sein du RHDP.
La constitution dite de la 3ème république renforce le pouvoir présidentiel « fort » de la constitution de 2000.
Dans la constitution dite de la 3ème république, le président de la république nomme aux emplois civils et militaires (article 67), il nomme le président du conseil constitutionnel juge des élections (article 129), il nomme le président de la haute cour de justice (articles 160 et 150) qui juge le président et les membres du gouvernement, il nomme les présidents de toutes les juridictions (article 145 et 146). Dans cette constitution en plus de la caporalisation des juridictions, le président de la république nomme 1/3 des membres de la deuxième chambre du parlement, le sénat (article 87). C’est là une régression notable de la garantie de séparation de pouvoir entre le législatif et l’exécutif.
Une telle concentration de pouvoir fait du président de la république de la 3ème république, un petit roi qui est au début et à la fin de la vie politique économique et sociale de la Côte d’Ivoire. C’est un pouvoir présidentiel « fort », véritable frein à l’expression des libertés et de la démocratie, qui sont abondamment proclamées dans le préambule et au chapitre des devoirs et des droits des citoyens de cette constitution. C’est un pouvoir présidentiel qui peut s’offrir le luxe, avec un parlement soumis, de modifier la constitution sans l’onction du peuple souverain.
Cette main mise de l’exécutif sur les autres institutions de la république empêche un contrôle effectif des actions gouvernementales et des autres élus. C’est là le plus grand danger qui guette la Côte d’Ivoire au cas où cette constitution est adoptée par le peuple.
La constitution dite de la 3ème république maintient l’ivoirité
La constitution de 2000 a légalisé l’ivoirité. La disposition la plus contestée est l’article 35 qui stipule que le candidat à la présidence de la république doit être ivoirien d’origine, né de père et de mère eux-mêmes ivoiriens d’origine. Le candidat doit donc, pour se conformer à la loi, produire les certificats de nationalité des grands parents. Pour avoir les certificats des grands parents il faut avoir les pièces d’état civil des arrières grands parents. Les démocrates, les patriotes et les révolutionnaires ont dénoncé en 2000, l’inapplicabilité de cette disposition constitutionnelle dans les conditions actuelles de la Côte d’Ivoire. Ils ont indiqué que cette disposition ne va servir en réalité qu’au pouvoir en place à faire éliminer des candidats sur la base de critères de nationalité impossibles à remplir pour la majorité des ivoiriens âgés de plus de 40 ans. Les élections de 2000 ont donné raison à ceux qui ont dénoncé cette disposition, car aucun des candidats n’a produit de certificats de nationalité de ses grands parents. Les élections de 2010 ont mis de côté cette disposition sur la base des accords de Marcoussis. Quelle forfaiture ! AU cours des élections présidentielles de 2015 auxquelles le PCRCI pris part, il a été demandé aux candidats de prouver leur nationalité par la production d’un certificat de nationalité, puis de certifier sur l’honneur que ses parents sont ivoiriens de naissance. Comme vous pouvez le constater la disposition est une fois encore dans la pratique mise de côte. La raison comme nous ne cessons de le dire est bien simple. Cette disposition est inapplicable.
La constitution dite de la 3ème république stipule en son article 55 que « Le candidat à l’élection présidentielle doit ….être exclusivement de nationalité ivoirienne, né de père ou de mère ivoirien d’origine ». La seule différence est qu’il est demandé aux candidats de prouver la nationalité ivoirienne d’un des parents au lieu des deux à la fois. Ainsi, comme on peut le constater la rupture n’est pas faite. La constitution dite de la 3ème république maintient encore la Côte d’Ivoire dans le débat sur la nationalité des grands parents et des arrières grands parents des candidats à la présidence de la république.
La constitution dite de la 3ème république comme celle de la 2ème ne contient aucune disposition pour la sauvegarde de la souveraineté nationale.
Elle fixe au Titre II relatif à la souveraineté nationale, le français, la langue de l’ex-puissance coloniale, comme langue officielle. L’on peut se demander en quoi l’usage du français, une langue étrangère, comme langue officielle est un trait de la souveraineté nationale.
Il faut également noter que, rien n’est prévu pour interdire l’utilisation, le stationnement sur le territoire national des armées étrangères.
La constitution dite de la 3ème république ignore comme la constitution de 2000 l’autonomie administrative
Dans cette constitution, la décentralisation et sa finalité, l’autonomie administrative sont insuffisamment prises en compte. Le sénat qui est composé d’élus des régions a un rôle national comme l’Assemblée nationale dont les élus sont aussi des élus locaux. En fait pour Ouattara le pouvoir local est dévolu à l’exécutif par le biais des préfets et sous préfets ses représentants dans les localités. C’est pourquoi au cours de ses deux mandats, l’essentiel des travaux de développement des régions ont été réalisés par le programme présidentiel d’urgence (PPU).
La constitution dite de la 3ème république maintient des institutions inutiles et budgétivores.
Cette constitution maintient des institutions budgétivores comme le Conseil Economique et Social, la Grande-Médiature qui sont des caisses de résonnance de l’exécutif et qui ne sont d’aucune utilité pour le bon fonctionnement des institutions de la république qui sont toutes dotées de structures techniques d’analyse, d’évaluation, de conseil.
Mesdames et messieurs les journalistes
Au total, tout indique que la constitution dite de la 3ème république censée être une rupture avec la constitution de la 2ème république n’en constitue pas une. Elle est une reprise pour l’essentiel de la constitution de la 2ème république.
La suppression du plafond de la limite d’âge de 75 ans, la disposition transitoire qui permet au président actuel de nommer un vice président, sans en démontrer l’urgence pour le fonctionnement des institutions de la république, l’absence d’une disposition transitoire pour écarter les présidents antérieurs qui ont déjà effectué deux mandats comme Ouattara, nous montrent que le RHDP sert à la Côte d’Ivoire une constitution pour pérenniser son pouvoir. Il s’est surtout attaché dans cette loi fondamentale à régler les problèmes de succession en son sein, au lieu de régler les problèmes de la Côte d’Ivoire.
Mesdames et messieurs les journalistes
C’est pourquoi le Parti Communiste Révolutionnaire de Côte d’Ivoire qui a rendu publiques ses thèses constitutionnelles depuis mai 2016, déclare à la presse nationale et internationale, aux peuples de Côte d’Ivoire, ce qui suit :
- Considérant qu’à l’analyse du contenu de l’avant projet de la constitution dite de la 3ème république, qui sera probablement adopté comme projet par le parlement unicolore, le RHDP nous propose une réforme de la constitution de la 2ème république conservant son caractère réactionnaire, autocratique et ivoiritaire,
- Considérant qu’il apparait une volonté manifeste du RHDP de se pérenniser au pouvoir par cette nouvelle constitution
Le Parti Communiste révolutionnaire de Côte d’Ivoire,
- dénonce les manœuvres frauduleuses du pouvoir Ouattara tendant à faire adopter cette constitution au forcing
- appelle les peuples de Côte d’Ivoire à se mobiliser pour empêcher la fraude électorale
- appelle les peuples à dire non à la nouvelle constitution dite de la 3ème république,
- appelle les peuples de Côte d’Voire à poursuivre le combat pour une nouvelle constitution qui institue un régime parlementaire, qui garantit l’expression de la souveraineté populaire et le contrôle du peuple sur les élus, garantit l’indépendance du pays, garantit l’unité des peuples.
Pour le Parti Communiste révolutionnaire de côte d’Ivoire
Le Secrétaire Général
Achy Ekissi